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Une matinée ordinaire du mois de Juin dans le Sud de Madagascar, le Centre d’Écoute et de Conseils Juridiques (CECJ) de Sakaraha avait reçu une dénonciation d’un cas de viol commis par le patron d’une jeune fille de 16 ans.

Convoquée directement par le centre, Jeanine, la jeune victime accompagnée par sa mère a d’abord hésité par peur mais a finalement accepté de raconter les faits et de décider à se libérer du fardeau : « Mon père est chauffeur mais depuis la crise sanitaire de COVID-19, il n’a plus de travail car les déplacements étaient interdits ; les écoles étaient fermées et j’ai donc travaillé chez ce Monsieur comme femme de ménage pour aider mes parents. Ma mère venait d’accoucher et ne pouvait pas non plus travailler. » Commença-t-elle.

« A chaque fois que la femme du patron est absente, il me faisait des avances, des attouchements sur mes parties intimes et me forçait à l’embrasser.  Il m’a proposé de faire une relation sexuelle avec lui contre de l’argent mais j’ai refusé ».

Jeanine, la jeune femme en a parlé avec sa mère mais celle-ci lui a demandé de continuer de travailler et de n’en parler à personne.

 

« Un dimanche, sa famille est sortie, il m’a forcé à coucher avec lui, j’ai crié mais il m’avait attachée sur le lit, et il m’a violée. La douleur était atroce, j’en ai tellement souffert et j’en ai parlé avec ma mère ». À la déception de Jeanine, sa mère a accepté l’argent proposé par l’agresseur contre leur silence. Heureusement, une voisine mise au courant de l’histoire a pris le courage de signaler auprès du CECJ.

L’accompagnement des intervenants sociaux ne s’est pas fait attendre. Après avoir reçu les consultations et soins médicaux pour les survivantes de violences, son cas a été référé auprès du Commissariat de Police qui a de suite appliqué la loi et a entamé les procédures pénales. L’arrestation du patron agresseur a été effectuée par le Commissariat et suivi du déferrement au Tribunal de Première Instance de Toliara. Encore sous mandat de dépôt, il est actuellement en attente de son procès.

« J’ai suivi des séances d’accompagnement psychosocial régulières dispensées par les intervenants sociaux pour me remettre de ce fardeau. J’en ai tellement souffert mais avec l’aide des intervenants sociaux que je remercie aujourd’hui, je suis redevenue de plus en plus moi-même. » nous a confié Jeanine, qui commence à retrouver le sourire malgré le traumatisme encore présent.

 

La culture patriarcale est encore profondément ancrée dans le District de Sakaraha, mais depuis l’existence du CECJ, un changement progressif du comportement a été constaté au niveau de la communauté suite aux différentes séances de sensibilisation et d’information sur les droits menées par le centre. Du côté des survivantes, les femmes sont de plus en plus nombreuses à venir briser le silence et à oser demander de l’assistance. La communauté a un rôle important à jouer dans le signalement de ces cas de violence car les auteurs sont toujours issus de la communauté.

Ce CECJ est opérationnel depuis 2016 sous la tutelle du Ministère de la Population et appuyé par UNFPA. Cette année le Royaume de la Norvège a amplifié le soutien apporté à ce centre. Depuis janvier, 240 cas de survivants sont enregistrés, avec une moyenne d’au moins un cas par jour.