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Le transport gratuit pour que les femmes enceintes puissent aller accoucher et effectuer les consultations pré-natales est opérationnel depuis le mois d’avril 2020 après l’annonce de l’apparition de premiers cas de COVID. Les villes d’Antananarivo, de Toamasina et de Fianarantsoa ont toutes été dotées de ces bus afin de venir en aide aux femmes enceintes compte tenu de la grande restriction au niveau du transport public et des couvre-feux mis en place. Depuis la mise en place de ce service, 1.500 femmes ont pu en bénéficier, dont 4 atteintes par la Covid-19.

 

Chantal Saholiarimino Veromanitra, sage-femme travaillant au CHU Analakinina à Toamasina nous raconte ses journées.

 

“D’habitude, nous réalisons 15 à 20 accouchements par jour. Être sage-femme pour moi c’est plus une passion qu’un travail et je le fais pour sauver et venir en aide aux femmes. Mais je ne vous cache pas que depuis le début de cette pandémie, j’ai la peur au ventre tous les jours. A chaque fois qu’on reçoit une femme enceinte pour consultation ou accouchement, nous sommes toujours sur nos gardes et prenons toutes les précautions. Dès qu’elles présentent des symptômes, nous les transférons directement dans les salles d’isolement qui ont été réservées pour elles. Depuis le mois d’avril, 2 femmes enceintes ont été déclarées positives au coronavirus. Comme nous sommes là pour assurer d’abord qu’elles reçoivent les soins nécessaires pour un accouchement sans danger sans qu’elles ne soient stigmatisées, nous prenons toujours nos courages à deux mains avec toutes les précautions et la sécurité nécessaire. Bien que la peur soit là, elle ne doit pas nous contrôler car nous avons nos devoirs et nos obligations envers les patientes, porteuses du virus ou non, et notre famille aussi”

 

Bien que la peur soit là, elle ne doit pas nous contrôler car nous avons nos devoirs et nos obligations envers les patientes, porteuses du virus ou non, et notre famille aussi”

 

Y avait-il une journée qui vous a le plus marquée?

“Une nuit plutôt (rires) vers 21 heures, deux hommes sont venus à l’hôpital nous signalant qu’une femme sans abri vient de donner naissance au gymnase, qu’il fallait couper le cordon ombilical et s’occuper des soins pour  la mère et le bébé. Nous étions tous surpris. Comme le gymnase n’était pas très loin de l’hôpital, j’ai tout de suite appelé le bus pou


Sage-Femme Chantal assurant la sécurité du bébé
(Photo: Dino Alexan/Ino Maresaka Tamatave)

r venir récupérer la dame au gymnase. Le chauffeur du bus a beaucoup hésité car il ne savait pas comment il allait prendre en charge cette femme et son bébé comme elle n’avait aucun accompagnateur. Comme il s’agissait de sauver la vie de la femme et de son bébé, j’ai pris l’initiative de venir avec le bus, j’ai pris avec moi une boîte d’accouchement, des gants et un clan ombilical. Ce en quoi je ne m’attendais pas était que tous les sans-abris de Toamasina étaient logés au gymnase de Soavita. Une fois sur place, une foule se trouvait autour de la dame et le bébé a été enroulé dans une petite couverture. Néanmoins, je savais que cette dame avait besoin de moi et de soins médicaux. Je me suis rapprochée d’elle et j’ai coupé le cordon ombilical. Heureusement que pendant tout ce temps, les pompiers étaient également venus et m’ont aidée notamment pour soulever et porter cette dame et son bébé dans le bus. En même temps, j’ai interpellé les personnes autour de moi pour enregistrer le numéro de téléphone du bus car 2 autres femmes enceintes se trouvaient aussi dans le gymnase. Tout de suite après nous avons utilisé le bus de transport pour les ramener à l’hôpital pour tous les soins réservés aux femmes qui viennent d’accoucher et pour les nouveau-nés. Une chose est pour le moins sûre, le lendemain je me suis faite réprimandée car je n’aurais pas dû sortir de l’enceinte de l’hôpital. Mais je me suis dit que c’est un devoir que je dois faire sinon cette femme et son bébé seraient en danger, en cette période exceptionnelle et ne sachant pas l’état dans laquelle elle est après l’accouchement, une minute d’attente peut constituer un retard dans sa prise en charge et on risquerait le pire.”

 

La jeune femme et son bébé ont reçu les soins et médicaments nécessaires grâce au courage et la prise en charge rapide par cette sage-femme et son équipe.

 

Les sages-femmes Nampoina, Monique, Narindra quant à elles, étaient en charge de Manda, évacuée en urgence d’une commune rurale à Antananarivo. Porteuse de la Covid-19 avec une indication d’opération césarienne son transfert vers un hôpital mieux équipé est indiscutable . Pour Nampoina, Monique et Narindra, au-delà de la situation sensible de leur patiente, l’objectif était de la rassurer et de faire en sorte que l’accouchement se passe bien. Selon elles, le respect strict des précautions doit primer, agir au-delà des discriminations que peuvent subir leur patiente et elles-mêmes en tant que personnel de santé en contact avec cette maladie est obligatoire,  le respect des soins humanisés  est vital. L’opération césarienne s’est très bien passée, Mme Manda se porte bien et le bébé commence à allaiter, le traitement de Manda pour guérir de la Covid19 se poursuivra dans sa localité. Une des grandes sources de motivation de cette équipe de la maternité de Befelatanana est d’entendre le mari de Manda s’exclamer : “Je ne peux contenir mon bonheur. Vous avez sauvé ma femme et notre bébé se porte à merveille. Merci, vraiment merci infiniment!”.

 

“Je ne peux contenir mon bonheur. Vous avez sauvé ma femme et notre bébé se porte à merveille. Merci, vraiment merci infiniment!”.

 

Dans ce contexte de la pandémie , 67 sages-femmes ont été déployées dans les régions les plus touchées vu que les ressources humaines constituent le talon d’achille de cette lutte.

Initié par le Ministère de la Santé Publique, soutenu par UNFPA Madagascar, ce projet de transport de femme enceinte se poursuivra jusqu’à la fin de la période de confinement et contribue à assurer zéro décès maternel même dans le contexte de Covid19.