Je m’appelle Narindra,19 ans.
Je vis avec ma mère depuis la séparation de mes parents il y a douze ans. Il y a quatre ans déjà, quand j’avais 15 ans, j’étais en classe de troisième au CEG, et quand j’ai eu mon BEPC, ma mère m’avais obligé de me mettre en couple et de vivre avec un homme marié de 45ans, un opérateur économique. Elle disait que c’est pour pouvoir supporter les charges de mes petits frères et sœurs comme mon père ne voulait plus nous aider. Je n’ai pas voulu mais elle m’a forcé de le faire et d’arrêter mes études.
Le monsieur a donné de l’argent à ma mère et la famille pour le « vody ondry » (la dote) et il contribuait aux charges mensuelles de ma famille. Il m’a emmené vivre avec lui dans une deuxième maison qu’il a louée, comme il était déjà marié. Il me demandait de faire des rapports sexuels tout le temps et si je n’acceptais pas il me criait dessus, m’insultait et me frappait. Je disais à ma mère que je ne supportais plus cette violence et que je voulais rentrer chez nous mais elle a refusé et m’a obligée à rester avec lui.
C’était vraiment une situation difficile de ma vie et je ne savais quoi faire que de souffrir en silence. J’en ai tellement souffert. Il voulait avoir un enfant avec moi alors que je n’étais pas encore prête.
J’avais une amie qui était membre à la maison des jeunes de Tuléar et qui m’a conseillé d’aller faire une consultation médicale au coin santé dans cette maison des jeunes pour faire le planning familial et éviter que je tombe enceinte. Je l’ai fait en cachette sans parler ni à mère ni à mon partenaire. Quelques mois après, j’ai entendu une séance de sensibilisation sur la lutte contre le mariage des enfants par des jeunes et j’ai retenu que forcer une filler mineur à se marier est un fait illégal.
J’ai demandé conseils et le jeune pair éducateur m’a orienté vers le Centre d’Ecoute et de Conseil Juridique (CECJ) pour connaitre mes droits et demander les démarches à suivre.
Je suis allée à ce centre en Février 2018 et j’étais accueillie par une Intervenant Sociale. Elle m’a écouté attentivement et m’a expliqué mes droits et les sanctions que peuvent subir mon partenaire et ma mère si je portais plainte. Je lui ai dit que je vais en parler avec ma mère d’abord. J’ai parlé avec ma mère et je lui ai dit de m’accompagner au CECJ mais elle a refusé et a dit qu’elle a le droit de décider à ma place comme je suis mineure et m’avais frappé d’avoir allé au CECJ sans sa permission. C’était aussi une décision très difficile pour moi mais je me suis dit qu’il était temps que ce cauchemar de ma vie s’arrête car je ne pouvais plus supporter de retourner vivre avec cet homme. Et donc, j’ai décidé de porter plainte quelques soient les conséquences sur ma mère. Je suis retournée au CECJ et a décidé de porter plainte. La police de mœurs et de protection de mineurs a arrêté ma mère et mon partenaire et les a déférés au parquet. Ils ont été condamnés, à dix ans d’emprisonnement pour mon partenaire et sursis de trois ans pour ma mère, comme elle était tombée malade avant le jour du procès.
J’ai bénéficié d’un accompagnement psychologique hebdomadaire au CECJ pendant Trois mois où j’ai pu me relever de cette acte.
Ma mère m’a demandé pardon et elle a même sensibilisé d’autres mères sur les droits des jeunes filles face à cette pratique. Ensuite, avec l’appui du CECJ, j’ai été réintégré à l’école pour mes études. J’aimerai toujours continuer mes études car j’ai une ambition de devenir journaliste pour ma carrière.
« Je remercie infiniment le CECJ de m’avoi appuyé et soutenu à ces processus suite à la violence que j’ai subi. J’ai continué à sensibiliser les jeunes filles et cette année je suis membres des Jeunes Paires Educateurs de la Maison des Jeunes de Tuléar. Je tiens toujours à sensibiliser les jeunes filles et les mères de prendre conscience que le mariage des enfants n’est pas une solution pour résoudre le problème familial et que c’est un fait punissable que ce soit pour les parents et pour l’auteur »
Ainsi, étant déjà victime, voici ce que je propose, et je sollicite l’implication de tous les acteurs et surtout celui de l’Etat à renforcer la sensibilisation auprès des jeunes surtout au niveau communautaire et rurale car beaucoup des jeunes acceptent facilement le mariage forcé par nos parents. L’éducation parentale par la mise en place des écoles des parents doit être primordial car face à la pratique traditionnelle, beaucoup des droits des jeunes filles sont ignorés par les parents. Il faudra aussi renforcer les nombres des espaces et maisons des jeunes car ce sont des lieux où les jeunes puissent avoir des informations sur leurs droits en matières d’éducation sexuelle. La réintégration scolaire est aussi nécessaire mais il y a d’autres jeunes filles victimes qui n’ont pas pu effectuer des études et doivent être appuyé à la réinsertion socio-économique par des formations professionnelles et collaborer avec les entreprises pour intégrer ces jeunes filles ayant obtenues des formations.
La fréquence des mariages précoces à Madagascar figure parmi les plus élevées dans le monde. Il est temps de changer cette pratique nuisible. La loi sur le mariage interdit le mariage de moins de 18 ans. Mais il faudra avoir une loi spécifique contre le mariage des enfants et l’application doit être effective à tous les niveaux. Il faudra également renforcer la mise à jour et l’opérationnalisation de la politique nationale de la jeunesse."
À Madagascar, plus de 40 % des jeunes femmes sont mariées avant l'âge de 18 ans. UNFPA Madagascar soutient les efforts du gouvernement malagasy pour mettre fin à ce fléau à travers le ministère de la population, avec les autres agences des Nations Unies comme l'UNICEF et d'autres partenaires.