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Madagascar fait face depuis de nombreuses années à une mortalité maternelle élevée. Le ratio de mortalité maternelle (335 [229-484] décès pour 100 000 naissances vivantes) est stagnant. Chaqueannée, environ 2 800 femmes décèdent - lors de leur grossesse ou à la suite de leur accouchement.
Malgré les efforts, la mortalité maternelle et néonatale peine à diminuer.
La proportion d’accouchements institutionnels demeure elle aussi très basse, avec une moyenne nationale à 39% ( MICS 2018 ), mais avec des variations significatives selon les régions. Réduire plus fortement la mortalité maternelle exige donc de s’assurer que la population a accès à une prise en chargeobstétricale de qualité dans un nombre suffisant de maternités.
Mobilisant les nouvelles technologies liées au Système d’Information Géographique (SIG), AccessMod,un logiciel développé par l’Université de Genève et l’OMS, permet d’établir des cartographies del’accessibilité aux maternités et de calculer la couverture de population en fonction des moyens et desvitesses de déplacement de la population dans une région donnée. Cette technologie a permis aux équipes du Ministère de la santé et ses partenaires dans les 22 régions sanitaires de proposer sur des critères objectifs un réseau de maternités SONUB et SONUC.
Un premier résultat de cette approche méthodologique innovante est d’avoir été capable de mesurer la couverture de la population du réseau de l’ensemble des 499 maternités réalisant plus de 15 accouchements par mois et du réseau SONU. Le réseau de 499 maternités couvre 47% de la population (àdeux heures de trajet). Un réseau de 236 maternités SONU a été identifié par les groupes de travail. Ce réseau couvre 43% de la population.
Une revue en post ateliers a réduit ce nombre à 170 maternités SONU. Ce réseau couvre 40% de la population (à deux heures de trajet). Plus réduit, le ministère augmente ses chances de transformer ce réseau théorique de maternités SONU en maternités SONU fonctionnelles, c’est à dire capables de prendre en charge 24h/24h toutes les complications obstétricales et néonatales avec un niveau de qualité satisfaisant. Pour le moment Madagascar ne dispose que de 19 maternités SONU fonctionnelles. Elles assurent cependant une couverture de 16% de la population (à deux heures de trajet). Pour le ministère de la santé et ses partenaires, l’objectif du présent et du prochain cycle de programmation (2021 - 2025) est d’augmenter le nombre des maternités fonctionnelles de 19 à 170 afin d’augmenter de 16 à 40% la couverture de la population ayant accès à une maternité SONU fonctionnelles. Une fois cette première étape réalisée, il faudra poursuivre l’effort d’améliorer la qualité des soins obstétricaux et néonatals.
Les couvertures mesurées pour l’ensemble des trois réseaux de maternités sont basses, non pas du fait d’un nombre insuffisant de maternités mais en raison des faiblesses du réseau routier, des moyens de transports publiques - chers et irréguliers - ainsi que de par la fréquente dispersion des populations sur le territoire. Ces résultats appellent dans de nombreuses régions à gérer ces situations d’enclavement par la mise en place d’un programme de maisons d’attente, des stratégies avancées de proximité tout en améliorant les moyens de transport motorisés à disposition de la population.
Un second résultat est de proposer une approche plus concrète de la notion de réseau, une question essentielle dans l’organisation de la réponse à la prise en charge des urgences obstétricales et néonatales. Elle doit être abordée à l’échelle de la région sanitaire. L’organisation des évacuations sanitaires est un des aspects importants du bon fonctionnement d’un réseau. Faute de temps, les ateliers organisés n’ont pas pu
aborder la question des liens de référence entre les maternités périphériques et le réseau des maternités SONU qu’il est important d’étudier pour pouvoir organiser l’ensemble des maternités. Les groupes de travail se sont concentrés sur l’analyse des liens de référence entre les maternités SONUB et leur SONUC de référence. Cette analyse a montré que seuls 20% de ces liens de référence pouvaient être qualifiés de
“satisfaisants”. Le problème dominant, mis en évidence dans la quasi-totalité des régions sanitaires est celui de l’existence d’importantes barrières financières. Toutes les régions sanitaires ont également souligné l’état dégradé des routes et des ponts, ainsi que l’insuffisance de moyens ambulanciers adaptés et disponibles. De nombreuses maternités périphériques se trouvent à plus 4 heures d’une maternité du réseau
SONU.
L’organisation des évacuations sanitaires appelle à une meilleure concertation avec les secteurs du gouvernement en charge de l’aménagement du territoire. En parallèle à l’effort à fournir pour améliorer le réseau routier, un mécanisme de solidarité nationale devrait permettre de réduire ou lever la barrière financière qui fait obstacle à une prise en charge efficace des urgences obstétricales et néonatales par le réseau des maternités SONU.
Un troisième résultat a permis de quantifier les besoins en sages femmes du réseau des maternités SONU. La capacité à prendre en charge les urgences obstétricales et néonatales dépendent beaucoup des obstétriciens, des médecins et des sages femmes. Ce rapport a principalement analysé le déploiement des sages femmes mais aussi celui des obstétriciens dans les maternités SONU. Selon le standard provisoire
qui avait été discuté lors de l’atelier national, on considère qu’il faut au moins 3 sages femmes par maternité SONU (pour assurer des soins 24h/24) et que chaque sage femme doit réaliser un maximum de 30 accouchements par mois (qualité de la prise en charge).
A cette aune, pour le seul réseau des maternités SONU recommandé par l’équipe d’appui, 125 sages femmes additionnelles sont immédiatement nécessaires pour assurer les soins obstétricaux. Nous estimons également qu’il y a un besoin de renforcer les compétences des sages femmes afin de leur permettre une meilleure prise en charge des urgences. Dans 14% des maternités du réseau, surtout des
maternités SONUB, on constate l’existence d’au moins 3 déficits en fonctions signalétiques, reflet d’un manque de capacité à prendre en charge les principales complications obstétricales et néonatales. C’est beaucoup, d’autant plus que la question n’a pas pu être documentée, faute d’information fiable, dans 95
maternités du réseau SONU. Il y a donc un besoin de mieux suivre les indicateurs de qualité des soins dans les maternités SONU, en commençant par établir un consensus sur les indicateurs à mesurer, en particulier en ce qui a trait à la prise en charge des urgences obstétricales et néonatales.
Une discussion sur le rôle des sages femmes dans les stratégies de lutte contre la mortalité maternelle, leur articulation avec les obstétriciens, médecins et infirmières ainsi qu’une révision de leur mission dans les maternités devraient être organisées.
 Les groupes de travail ont également bien montré que les maternités SONUB constituaient la principale faiblesse du réseau en matière d’effectifs, d’infrastructure et d’équipement. Un standard “maternité SONUB” devrait aider à mieux qualifier et quantifier l’importance de ce problème.
Ce rapport va permettre au Ministère de la santé d’élaborer ses propres directives sur la question du développement du réseau SONU. Il doit également permettre une planification plus aisée du programme de santé maternelle et néonatale, notamment dans les régions sanitaires. Une fois le réseau national SONU validé, la prochaine étape est donc d’utiliser cette cartographie et ces nouveaux indicateurs opérationnels pour élaborer les plans opérationnels en santé maternelle et néonatale dans chacune des régions sanitaires du pays.