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L’UNFPA Madagascar a lancé du 27 avril au 27 mai 2020 une enquête de perception pour déterminer les impacts de la pandémie de COVID-19 sur la situation des femmes et les violences basées sur le genre. Cette recherche à caractère qualitatif avait pour objectif d’évaluer la connaissance des femmes en matière de prévention de la pandémie, de déterminer les actions que les femmes ont menées durant la période de COVID-19, et d’analyser les impacts de la COVID-19 sur la vie des femmes et les violences basées sur le genre, ainsi qu’au niveau de leurs communautés. La population cible de l’étude est constituée de femmes qui ont accès à l’internet. La collecte de données s’est faite en ligne avec l’outil « Google form » à l’aide d’un questionnaire à réponses uniques ou multiples, et des questions ouvertes. 176 femmes ont répondu à l’enquête ; les données recueillies ont été traitées sur Excel et SPSS.

Résultats clés de l’enquête :

a. Profil des répondantes

 

  • Environ la moitié des femmes répondantes sont mariées (49%), la majorité (67%) sont âgées de 20 à 39 ans.
  • 40% des femmes viennent de la région d’Analamanga suivi de 31% de la région d’Atsimo Andrefana.
  • Plus d’un quart (27%) des répondantes sont des travailleurs libéraux, 20% travaillent au niveau des entreprises ou ONG, 16% sont fonctionnaires de l’État et 13% sont des étudiantes, 9% sans emploi et 7% font du travail informel (petits boulots) comme lavandière, femme de ménage.

b. Sources d’informations et connaissance sur la COVID-19

 

  • La télévision reste la première source d’informations pour 84% des répondantes, suivi de réseaux sociaux pour 72% des répondantes et de la radio pour 63% des répondantes. Seuls 22% des répondantes privilégient encore les journaux papiers suivis de 21% des répondantes qui s’informent auprès des agents de santé.
  • Plus de quatre cinquième (81%) des femmes connaissent au moins 8 gestes barrières pour la prévention contre la COVID-19. Toutes les femmes de 15-19 ans ont répondu qu’elles connaissent plus de 8 gestes barrières contre la COVID-19. Les répondantes de la région Analamanga ont une meilleure connaissance de gestes barrières que celles des autres régions.

Les gestes barrières les plus connus sont « le lavage fréquent des mains à l’eau et au savon ou utilisation d’une solution hydro-alcoolique», « la distanciation d’au moins 1 mètre avec les autres personnes, en particulier si elles toussent, éternuent ou ont de la fièvre » et « le port de masque en public ».

c. Actions, mesures prises et par les femmes, occupation durant la COVID-19 et perspectives

 

  • Plus de la moitié (52%) des répondantes ont partagé ce qu’elles ont fait ou les mesures prises durant la COVID-19. Parmi elles, 63% ont affirmé qu’elles étaient mobilisées directement au niveau de la communauté à travers des sensibilisations, des conseils et de la protection des femmes aux différentes formes de violence et leurs prises en charge. Deux femmes ont affirmé s’être éloignées de leurs maris pour éviter les violences.
  • Concernant l’occupation pendant le confinement, la moitié des répondantes poursuivent normalement leur travail. 29% des femmes dont la plupart sont des étudiantes ou sans emploi, ont dit de n’avoir rien fait.
  • Les femmes sont conscientes de l’importance de la prévention sur la COVID-19 ; elles ont déclaré avoir suivi les consignes à respecter pour se protéger contre la COVID-19.
  •  80 % des personnes interrogées considèrent que les femmes tiennent une place importante au sein de leur famille pour sensibiliser et suivre les  consignes de prévention.
  •  30% des réponses ont montré que les femmes sont de bonnes influenceuses, elles ont une place importante dans les activités de sensibilisation sur la pandémie de leur communauté.

 

d. Impacts de la COVID-19 au niveau de la communauté selon l’opinion des répondantes

 

  • La COVID-19 et le confinement ont impacté la vie des femmes : le manque d’argent ou la baisse de revenu pour 70% des répondantes, le chômage technique pour 15% des femmes répondantes dont la majorité travaillaient dans les entreprises privées. La pandémie entraine également l’isolement, l’augmentation de la consommation de tabac et d’alcool, l’insuffisance d’accès aux informations relatives à la lutte contre les violences basées sur le (VBG) ou d’accès aux services de prise en charge de VBG. L’opinion de trois quarts (77,3%) des femmes révèle que le confinement contribue à une augmentation de la violence basée sur le genre.
  • 80% des femmes répondantes ont affirmé que c’est la violence psychologique qui est prépondérante au niveau de la communauté durant la COVID-19 et le confinement. Plus de 60% des répondantes estiment que les femmes subissent les violences physiques au niveau de leur communauté. 56% des répondantes ont affirmé que les femmes subissent les violences économiques. Un quart des femmes répondantes (27,3%) pensent qu’il y a des cas de viol pendant la période de pandémie de COVID-19 au niveau de leur communauté. Plus de la moitié des répondantes (58%) estiment que les femmes survivantes de VBG se tournent surtout vers les membres de leur famille ou vers les amis pour trouver des solutions. 36,9% croient que les femmes auraient eu recours au niveau des centres de prise en charge. Trois quarts des répondantes ont aussi affirmé que parmi les facteurs de non recours des femmes en cas de violence sont la peur, la culture du silence et l’acceptation de la violence par les survivantes.

e. Impacts de la COVID-19 au niveau du ménage des répondantes et au niveau des répondantes elles-mêmes

  • 46% des répondantes ont annoncé que la pandémie de COVID-19a provoqué un comportement agressif au niveau des membres de la famille ; la majorité des auteurs (63%) sont les pères ou maris. 43% des femmes ont déclaré avoir observé des membres de famille présenter des signes de dépression. Il ressort de l’analyse que 40% des répondantes ont subi l’agressivité ou conflits au sein des familles. 15% des répondantes ont déclaré que les membres de la famille ont un comportement physiquement agressif envers les autres personnes du ménage, 10% ont observé des comportements d’agression sexuelle.
  • 13% des répondantes ont déclaré n’avoir observé aucun changement de comportement au niveau des membres de leurs familles durant la période de confinement.
  • Des changements ont été également observés au niveau des enfants ou jeunes, notamment les émotions agressives, les signes de dépression, la consommation excessive d'alcool, l’agressivité et des conflits.
  • La moitié des répondantes ont déclaré avoir subi au moins un type de violences durant la période de COVID-19 ou de confinement. Les femmes qui sont membres d’association sont moins victimes que les non membres.
  •  79,5% des survivantes ont subi de violences psychologiques, durant la période de COVID-19 et de confinement; 31% des survivantes ont été victimes de violences économiques. Les violences sexuelles qui ne se déclarent pas automatiquement en situation normale présentent une proportion non négligeable de 26%. Un cinquième de survivantes de violences durant la COVID-19 (21%) ont partagé qu’elles ont eu de violences physiques ; 78% des femmes ayant déclaré être survivantes de VBG durant la période de COVID-19 ont dit que la situation de COVID-19 a aggravé leur situation. 31% des survivantes de VBG se sont rapprochées des centres de prises en charge pour bénéficier d’assistance dans les zones où il n’y avait pas de confinement total, notamment dans la région Atsimo Andrefana. D’autres survivantes ont cherché du recours auprès des amis et des parents pour trouver des solutions ou tout simplement faire des arrangements entre familles pour éviter les représailles.   Les autres recours mentionnés par les femmes étaient faits auprès des leaders religieux, et des Chefs de Fokontany et dans les groupes de réseaux sociaux. Pour celles qui ont mentionné qu’elles n’ont pas agi face à leur situation de violence, toutes ont donné comme raison la peur, la peur d’arriver à la séparation, la honte et l’ignorance de moyens pour trouver de l’aide ou de soutien. 4% des survivantes ont déclaré avoir recouru au niveau de la Gendarmerie et de la Police. Certaines femmes ont déclaré avoir recouru aux autorités religieuses.
  • 11% des femmes répondantes ont bénéficié d’aides sociales durant cette période de confinement. Parmi les 20 femmes qui ont répondu avoir bénéficié d’aide sociale, 7 d’entre elles ont répondu avoir été victime de harcèlement sexuel de la part des pourvoyeurs d'aides.

 

  • Il y aurait donc des acteurs humanitaires qui abuseraient des bénéficiaires et profiteraient de leurs vulnérabilités.

 

f. Les besoins des femmes face à la COVID-19 et pour lutter contre les violences basées sur le genre

 

  • Les femmes présentent différents besoins socio-économiques afin de lutter contre les différentes agressions dont elles doivent se protéger et ainsi que leurs proches. Un peu plus de 40% des femmes répondantes ont mentionné comme besoin le renforcement de la sensibilisation de la population. Presque le quart des femmes souhaitent surtout le respect de leurs droits. La nécessité de l’éducation des filles et des garçons dès leur bas âge a été mentionnée par 18% des répondantes comme priorité. Il a été évoqué par 17 % des répondantes que le fait d’avoir du travail et de revenu propre permet aux femmes d’être autonomes et indépendantes. Ceci leur permet d’éviter les violences.

 

  • Des répondantes ont donné leurs opinions sur l’importance du renforcement de prise de décision et l’implication des autorités dans la lutte contre les VBG, dans le contrôle de la consommation d’alcool et drogues. D’autres femmes ont mentionné leur besoin sur le renforcement de sécurité, la confidentialité et la protection des femmes, le soutien moral, des points importants à prendre en compte et à adapter dans leur quotidien. Enfin, face aux conséquences de la COVID-19 sur ces femmes, il est à souligner que la sensibilisation auprès des cibles reste à renforcer pour avoir un meilleur impact et changement de comportements.